Le courage d’être libre

J’ai toujours aimé écrire. Durant mon adolescence, les gens autour de moi reconnaissaient mon talent et ça me rendait fière. Je lisais aussi tout ce qui me tombait sous la main, je dévorais les pages avec un appétit sans fin.

J’ai donc décidé de m’inscrire au baccalauréat en lettres & sociologie à l’Université d’Ottawa en 2009. Mon parcours s’est modifié et je me suis finalement inscrite au programme en sociologie & communication.

Mon histoire d’amour avec l’étude de l’humanité a été foudroyante. Je buvais les paroles de mes professeur.es, j’intégrais mes nouvelles connaissances, je me sentais stimulée intellectuellement et ça me faisait un bien fou. Je m’intéressais aux études de genre, à la psychologie sociale, au processus de création des normes sociales et à tout ce qui pouvait toucher les relations informelles entre les humains.

Prendre un pas de recul pour mieux avancer

En 2e année du bac, j’ai eu l’opportunité de suivre un cours d’anthropologie sociale et culturelle. J’ai découvert par le fait même cette science qui étudie les cultures et les sociétés à travers le monde et j’ai instantanément ressenti le besoin d’en apprendre davantage, d’élargir mes horizons. Je me suis inscrite au programme bidisciplinaire en sociologie & anthropologie afin de plonger tête première dans cette mer de connaissances qui s’offrait à moi. Au cours de mon parcours en sciences sociales, j’ai eu l’opportunité de croiser des professeur.es très inspirant.es qui ont grandement contribué à la création de la femme que je suis devenue. Ces personnes m’ont fait réfléchir, prendre conscience de mes propres privilèges et m’ont amené à développer un esprit critique, outil fort précieux.

À la fin de mon baccalauréat, j’ai été acceptée au programme de maîtrise en anthropologie. Je souhaitais pousser mes réflexions plus loin, je sentais le besoin de creuser les sujets qui me passionnaient. Cette période a été plus difficile pour moi, je réfléchissais à mon avenir et je n’étais plus certaine si l’anthropologie m’amènerait sur le chemin qui me faisait envie. J’ai vu cette année à la maîtrise comme une opportunité de développer de nouvelles habiletés et de nouvelles amitiés qui perdurent encore. J’ai pris le temps d’entamer, pour la première fois dans ma vie, une réelle réflexion quant à mon avenir et ce que je désirais profondément.

L’engagement dans ma communauté & mon amour pour le travail social

Parallèlement à mes études universitaires, je gravitais autour d’un organisme communautaire qui offrait du soutien aux jeunes allosexuel.les de 14-25 ans. Avec Jeunesse Idem, j’ai mis le pied dans le monde de l’intervention en milieu communautaire et j’ai tout de suite su que je ne voulais plus en sortir. Cette expérience a été pour moi si marquante que j’ai pris la décision de m’inscrire à la maîtrise en travail social, malgré les réticences de certaines personnes autour de moi. Je me sentais enfin fière de moi et pleine de courage. Dès mes premiers séminaires, j’ai senti que j’avais trouvé le travail qui ne serait jamais un travail pour moi. J’ai eu l’opportunité de faire deux stages en milieu communautaire. Ces expériences auront été salvatrices et tellement enrichissantes. M’engager au sein de ma communauté aura été une façon pour moi de me sentir utile et d’avoir le sentiment que je faisais parti de la solution.

L’année où j’ai remplacé la peur par le courage

Au printemps 2016, j’ai pris la décision d’aller rejoindre la personne avec qui je partageais ma vie à Rouyn-Noranda en Abitibi-Témiscamingue. La peur était belle et bien présente, mais j’avais choisi « je remplace la peur par le courage » comme mantra cette année-là, je ne pouvais pas reculer. J’ai continué l’écriture de mon mémoire de maîtrise en même temps que la découverte de ma nouvelle ville et de ma nouvelle vie. J’ai rapidement été séduite par l’accueil chaleureux qui m’a été réservé. Je développais tranquillement mon indépendance, sortais de ma zone de confort sur une base quotidienne et gagnais par le fait même une confiance en moi qui m’étais jusque là inconnue.

J’ai déposé mon mémoire en juillet 2016 et j’ai été embauchée aux Marginales en août. Ma première expérience professionnelle à titre d’intervenante s’est créée dans un organisme communautaire qui offrait de l’hébergement pour les femmes de 18-30 ans qui désiraient reprendre leur pouvoir d’agir. J’ai grandi en même temps que les résidantes, j’ai dû faire preuve de débrouillardise et surtout faire taire le syndrome de l’imposteur qui avait fait sa place à l’intérieur de moi. Très souvent, mes insécurités prenaient toute la place et je devais me rappeler que ce que j’étais, suffisait. Dans le cadre de mon travail et de mes implications bénévoles, j’ai rencontré ma communauté et les gens extraordinaires qui la composent. J’ai tissé des amitiés solides, généreuses et qui me font du bien. J’ai l’immense privilège d’être entourée d’humains exceptionnels avec des coeurs immenses et des valeurs sociales bien ancrées.

L’année où ma vie a fait un 180 degrés complet

Avance rapide jusqu’au printemps-été 2018 : j’ai fais le saut dans le vide et j’ai mis fin à ma relation de couple des 7 dernières années (et dans laquelle ma vie sexuelle était inexistante), j’ai eu le coup de foudre pour l’homme de ma vie et j’ai accepté un nouvel emploi d’intervenante dans un autre organisme communautaire. Parallèlement à tout ça et avec le support de ma tribe, j’ai lancé mon entreprise Comme des lapins le 4 octobre 2018. Avec ma plate-forme, j’aspire à faire parti de la solution en offrant un espace authentique, inclusif et féministe pour parler de sexualité saine, sans bullshit ni préjugé. Aussi, j’accompagne les femmes qui désirent reprendre leur pouvoir d’agir sur leur sexualité en offrant un service de consultation personnalisé et authentique.

En 2018, j’ai réalisé que pour être heureuse, je devais prendre une nouvelle route et que cela ne se ferait pas sans peur, mais avec beaucoup de fierté. J’ai trouvé le courage d’être libre et j’ai le sentiment profond que le reste de mon existence commence maintenant !

Marie-Pier Deschênes